Mondes Sensibles

C’est l’automne déjà. 

Les jours raccourcissent. La lumière s’en va doucement. On entre dans la période où elle va se faire plus discrète, plus chaude quand elle sera là, plus douce aussi. J’aime regarder la lumière. C’est mon « métier » de photographe, approcher la lumière. Je pense souvent aux premiers peintres qui sont sortis de leur atelier pour aller la saisir. Et je me dis que nous avons bien de la chance, avec nos téléphones dans nos poches, capables d’enregistrer le moindre bout de monde, la moindre parcelle de lumière, le moindre rayon de soleil sur la table de la cuisine. 

C’est au moment de l’année où je sais qu’elle se fera plus parcimonieuse que je me souviens de la lumière.

Avec les enfants, dans les ateliers scolaires pour lesquels je suis appelée, on parle beaucoup de jardins (c’est le Domaine National de Saint-Cloud https://www.domaine-saint-cloud.fr/ qui le plus souvent me fait confiance) et de lumière. 

On la regarde, on l’observe, on la traque à travers les branches des arbres. On évite de regarder le soleil en face, on fait des expériences pour savoir comment ça marche, la lumière et la photographie.

On s’étonne, on s’émerveille. On photographie, on rate, on recommence, on cherche, le meilleur angle pour faire entrer la lumière – et l’ombre sa jumelle – dans nos petites boites numériques. 

J’aime partager ces moments avec eux. 

J’aime qu’on réfléchisse ensemble sur ce qu’il faut pour « faire » une photo. Les ingrédients de la recette. 

Un téléphone !

Une tablette ! 

Un appareil photo ! Je prends souvent celui de mes parents ! J’en ai eu un pour Noël ! 

Oui, mais encore ?

Quelque chose à photographier ! 

Oui, tout ça, et il faut encore autre chose …

(Silence, ils cherchent)

Je vous aide : vous pouvez faire des photos quand il fait nuit ?

Non, on voit rien. 

Ah oui, il faut allumer la lumière ! 

Il faut un flash !

Alors, de quoi vous aurez besoin, tout à l’heure, quand on sera dehors ?

De la lumière du soleil !

Oui ! Et d’ailleurs, Nicéphore Niepce, l’inventeur de la première photographie de l’histoire, avait appelé son invention : héliographie. 

Et on décortique le mot : hélio – grec : soleil

Et graphie, vous connaissez ?

Oui : c’est comme graphisme !

Et qu’est-ce que vous faites quand vous faites du graphisme ?

On fait des signes ! Des ronds, des triangles ! Des lignes ! 

Ah oui, on dessine !

Oui, vous dessinez, et vous écrivez. Héliographie : on écrit, on dessine avec le soleil.

Et puis on a décidé d’employer un autre mot, un peu plus tard, pour l’invention de Nicéphore. Il n’a pas eu beaucoup de chance, on n’a pas gardé le nom de sa trouvaille et il a terminé sa vie ruiné. Et on l’a presque oublié. Même nous, dans nos ateliers – deux heures, c’est court – on oublie héliographie et on passe direct à photographie… (Cette année, Nicéphore, promis, je ne t’oublierai pas). 

Photographie : écrire avec la lumière. 

J’aime leur raconter cette histoire. J’aime les voir commencer à regarder la lumière du jour autrement, comme quelque chose de presque palpable. 

J’aime me réveiller le matin, sentir que l’automne est là et me souvenir de la lumière. 

Et puisqu’on parle d’écrire, dans cet article qui inaugure cette nouvelle rubrique, j’aimerais vous dire que vous allez lire de plus en plus souvent dans ce blog. Mes histoires de photographie que j’ai envie de partager depuis longtemps avec vous. Mais je n’osais pas, je tournais autour, sans trop savoir quel fil tirer ni comment le tisser. Et puis, j’ai décidé de me lancer. Enfin, pour être tout à fait honnête, c’est Namir, qui m’a suggéré que peut-être mon expérience de photographe autodidacte pouvait être intéressante à raconter. Je termine actuellement sa formation d’écriture créative en ligne et comme c’est vraiment riche, curieux, étonnant, pertinent, percutant et j’en passe, je vous mets le lien : https://www.active-change.com/formation-ecriture-creative-2022.

Et puis, si ça vous tente, un stage de trois jours est organisé fin octobre et je me réjouis d’y participer. Et comme plus on est de fous, comme on dit, voici le lien : https://www.active-change.com/ee

Je me suis laissée dire qu’il restait quelques places. Et ça serait vraiment chouette de s’y rencontrer.